Contrairement aux apparences ou aux croyances, la technique de la course à pied reste assez complexe.
En effet, plusieurs points nécessitent une attention particulière
Voici 9 points qui me semblent fondamentaux :
1- Les variations verticales de l'épaule
2- La courbe de déplacement de la hanche doit être la même que celle de l’épaule
la durée de la séquence correspond à un cycle
- les temps de pose des pieds,
- les vitesses des pieds lors du retour de jambes,
- les vitesses des genoux lors du retour de jambes .
- la variation de la verticalité du tronc
- les angles d’attaque de la jambe lorsque le pied touche le sol
- l’angle de la jambe lors du retour du pied.
L’expertise du mouvement consiste à prendre une vidéo d’un cycle et, pour chaque image, de cliquer sur les articulations que l’on souhaite étudier afin de mettre en évidence les variations des vitesses et accélérations ainsi que les variations des positions segmentaires.
Pour cette étude, j’ai cliqué sur l’épaule gauche, la hanche gauche, le genoux gauche, la cheville gauche, la hanche droite et le pied droit. Le film est sur une fréquence de 60 images pas seconde, soit une image tous les 1,6 centième de seconde.
Ces séquences vidéos ont été filmées lors de la moitié de course, pendant « la foulée des cochons » de Marsanay le bois du 20/05 2017. Les 3 premiers, à cet instant de course, c’est à dire, CHAHID Khalid, REMOND Thomas et CALLIER Romain, ainsi que HEBTING Valérie qui se situe en milieu de peloton, ont été étudiés.
Ces digitalisations montrent la qualité de plusieurs points techniques importants qui participent à la performance, que le coureur soit du niveau élite, ou non, et quelque soit son âge.
- Ainsi, nous pouvons observer dans un premier temps, les variations verticales de l'épaule. Plus ces variations sont faibles, plus le coureur va vers l’avant et non vers le haut ce qui rentabilise sa course. Dans ce cas, la différence de hauteur de la courbe entre le point le plus bas et le point le plus haut est de 20 cm. Le coureur tend à se propulser plutôt vers le haut au détriment d’une poussée vers l’avant. Il n’est cependant pas rare de voir des variations très intéressantes de seulement 5cm
- Egalement, la trajectoire sagittale des hanches doit être la même que celle des épaules afin de restituer convenablement la force de rebond du pied : un tronc bien gainé restituera mieux l’énergie de poussée du pied qu’un tronc tout mou. La courbe rouge (épaule) doit, de ce fait, être identique dans sa forme à la courbe verte (hanche). Cet exemple montre une grande similitude, ce que n’est pas forcément le cas chez les autres coureurs des études ci-dessous.
- Enfin, la durée de la séquence correspond à un cycle, donc à deux foulées. On sait que la qualité de la force dépend du compromis entre la fréquence gestuelle (tourner vite les jambes) et l’amplitude (avoir une grande foulée). Dans le 1er cas, on est plus sur une action nerveuse alors que sur le second, on est plus sur une action musculaire. Il semblerait que le meilleur compromis soit basé sur une valeur de 3 foulées en une seconde, ou alors dit autrement, d’un cycle et demi en une seconde, donc, un cycle (deux foulées) en 0,66 seconde. Le logiciel permet donc de mesurer la durée de la séquence et d’en apprécier sa valeur.
La digitalisation met également en évidence
- les temps de pose des pieds,
- les vitesses des pieds lors du retour de jambes,
- les vitesses des genoux lors du retour de jambes .
Cela permet de vérifier la qualité du rythme de la foulée ainsi que les différents déséquilibres et donc les
fuites de force.
Un exemple ci-dessous pour le temps de pose du pied au sol (l’axe horizontal correspond au numéro des
images, sachant qu’il y a 60 images/seconde, donc une image tous les 1,6/100e) : ce graphique met en évidence que le
temps du pied droit (courbe rose au début et en bas du graphe) est de 6 images (9,6/100e de seconde) alors que le pied
gauche (courbe bleue) est de 3 images (de l’image 23 à 26) donc de 4,8/100e de seconde. Il y a donc sans doute un
déséquilibre dans la foulée de ce coureur qui à terme, peut engendrer des blessures.
Ainsi, les courbes roses et bleues devraient être similaires.
Sur ce même graphe, la vitesse de retour du pied gauche (bleue au pic à l’image 13) est moins rapide (4 m/s) que
pour le pied droit (rose à l’image 33) : 5,57 m/s. Comme précédemment, ceci peut également engendrer des blessures à long termes.
Un même regard sur les genoux permet d’identifier la même chose.
Certes, on pourrait croire que la vitesse du pied est
la même que celle du genoux,
mais il n’en est rien. En effet, la vitesse du pied n’est pas directement dépendante de celle du genoux car un pied
plus haut ou plus bas peut induire une vitesse différente par sa rotation autour du genoux.
Dans cet exemple, voici une vitesse symétrique des genoux; genoux gauche : courbe bleue foncé, genoux droit courbe
jaune. Leur vitesse maximale (à l’image 0 pour genoux droit et à l’image 25 pour le genoux gauche) est de 6,09 m/s :
La digitalisation permet aussi de voir
- la variation de la verticalité du tronc
- les angles d’attaque de la jambe lorsque le pied touche le sol
- l’angle de la jambe lors du retour du pied.
- Concernant la variation de la verticalité du tronc, il est rare de voir un tronc positionné vers l’avant à un angle fixe. Voici un kilogramme, c’est à dire une représentation du corps par de simples traits. On peut voir la tête, le tronc, la cuisse et la jambe, cela à plusieurs instants de la foulée, sachant que le coureur se déplace ici de droite à gauche. On voit très nettement que le tronc passe d’une position en avant (valeur angulaire supérieure à 90°) à une position vers l’arrière (valeur angulaire inférieure à à 90°)
En règle général, il reste vers l’avant en oscillant de 110° à 95°, donc de 5 à 10° vers l’avant de la verticale.
Cependant, un tronc qui oscille de l’avant vers l’arrière va entraîner une fuite de force, surtout lorsque cela se passe lors de
la poussée du pied. Le tronc en arrière va alors absorber la force induite par le pied lors de sa poussée.
Voici un exemple où la courbe rouge (le tronc) varie de 84° (en arrière) à 110° (en avant) :
- Egalement, la digitalisation permet de voir les angles d’attaque de la jambe lorsque le pied touche le sol :
A gauche, un angle de la jambe trop faible (donc une jambe quasi dans l’alignement de la cuisse) peut provoquer des chocs
importants et risque de créer une blessure à terme. Inversement, à droite, une jambe verticale (son angle à 90°), c’est à dire une jambe
trop fléchie, va provoquer un affaissement du centre de gravité et donc une fuite de force. Il semblerait que l’angle idéal de la jambe
devrait être d’environ 85°, donc légèrement inférieure à la verticale.
Les courbes bleu-foncées et jaunes du graphe ci-dessus montrent, en image 19 et 39 les angles d’attaque des jambes gauches et droites
respectivement. La jambe gauche attaque à environ 84° ce qui semble être une bonne valeur. En revanche, la jambe droite a un angle plus faible.
Elle attaque donc en prolongement de la cuisse ce qui amplifie les chocs.
- Enfin, l’angle de la jambe lors du retour du pied demande une attention particulière :
Une jambe avec un talon plus haut que le genoux (la jambe placée sur un angle de 190° c’est à dire une cheville placée à 10° au
dessus du genoux) permettrait de créer une énergie cinétique (une force supplémentaire) qui va s’ajouter à la vitesse de l’engagement du genou,
facilitant son action. En revanche, une cheville trop haute va créer une énergie cinétique vers le bas (système de fouetté de jambe) qui va
annuler la vitesse vers l’avant du genoux ce qui va provoquer un déséquilibre. Il faudra alors plus d’énergie pour corriger cela et engager
le genou.
Une cheville trop basse ne va pas créer d’énergie cinétique, le genoux devra en plus de son action vers l’avant, « tirer » son propre pied
et donc consommer plus.
Dans l’exemple graphique ci-dessus, au regard des courbes bleu-foncés et jaunes, l’angle de la jambe est d’environ 200° (images 3 et 24 pour
les jambes G et D respectivement), la cheville est donc bien au dessus du genoux ce qui n’est peut être pas très favorable à un bon retour de
pied. En effet le pied va avoir un effet de « fouetté » plutôt orienté vers le bas créant un déséquilibre que le tronc devra compenser au
détriment des actions musculaire d’avancement.
En revanche, les angles des deux jambes sont identiques.
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Voici les résultats de nos personnes étudiées : l’axe des x correspond aux numéros des images (une image à chaque
1,6 centième de seconde) et l’axe des y, pour les courbes des vitesses est exprimé en m/s. Pour les courbes des coordinations
(positions segmentaires) l’axe des y est exprimé en degré par rapport à l’horizontal.